Le Cameroun traverse une crise économique marquée par un taux de chômage alarmant de 74 %, un salaire minimum plafonné à 41 875 Fcfa et une inflation attei- gnant 5,7 % en 2024. Face à ces difficultés, de nombreux jeunes, en quête d’un avenir meilleur, privilégient l’émi- gration vers des pays offrant de meilleures perspectives, notamment le Canada
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Entre 2022 et 2023, le nombre de Camerounais ayant immi- gré au Canada est passé de 200 à 15 700. En 2024, cette tendance s’est accélérée, avec près de 6 000 départs enregistrés entre janvier et avril. En l’espace de deux dé- cennies, plusieurs centaines de milliers de Camerounais ont fait le choix de l’expatriation vers ce pays nord-améri- cain, attirés par de meilleures conditions de vie et des op- portunités professionnelles plus attractives. Derrière cette migration massive se cache une réalité préoccu- pante : le chômage endé- mique, la corruption, le favoritisme et les multiples crises socio-économiques qui frappent le pays. Selon le Groupement des entreprises du Cameroun (Gecam), cette fuite des talents a un impact direct sur l’économie natio- nale et le marché du travail.
Une perte de compétences qui fragilise l’économie
Le départ massif de travail- leurs qualifiés affecte particu- lièrement des secteurs clés comme l’éducation et la santé. Ces derniers mois, des milliers d’enseignants, de médecins et d’infirmiers ont quitté la fonction publique, aggravant ainsi le déficit de personnel dans ces do- maines essentiels. Les entre- prises privées ne sont pas en reste. Nombre d’entre elles, après avoir investi dans la formation de leurs employés, se retrouvent confrontées à des démissions en cascade, mettant en péril leur compéti- tivité. « Ces départs laissent un vide parfois difficile à com-
bler et obligent les entre- prises à assumer les dettes contractées par des em- ployés qui quittent le pays. De plus, lorsque ces derniers avaient des emprunts en cours auprès des institutions financières, cela compromet l’accès au crédit pour les au- tres salariés », déplore Cé- lestin Tawamba, président du Gecam Situation qui interpelle les autorités Cette hémorragie de talents, motivée par la précarité de l’emploi, le coût élevé de la vie et le manque d’opportuni- tés, alimente une réflexion sur la nécessité d’améliorer les conditions de travail et les perspectives économiques au Cameroun. Si l’expatria- tion offre une chance de réussite individuelle à de nombreux jeunes, elle consti- tue un défi majeur pour le pays, qui peine à retenir ses compétences. Face à cette réalité, les autorités camerou- naises sont appelées à met- tre en place des politiques efficaces pour freiner l’exode des travailleurs qualifiés et assurer un développement économique durable.
Kengne Taahla