samedi 24 mai 2025

Le Cameroun fait face à un déséquilibre criant dans l’orientation sco- laire et universitaire. Alors que les besoins du marché du travail requiè- rent des compétences techniques et scienti- fiques, la majorité des étudiants s’orientent vers les sciences sociales, le commerce et le droit. Ce qui compromet l’indus- trialisation et freine la croissance économique

Le Rapport national sur le développement humain 2022, publié le 5 février 2025 par le mi- nistère de l’Économie, de la planification et de l’Aména- gement du territoire (Mine- pat) en partenariat avec le Programme des nations unies pour le développe- ment (Pnud), met en lu- mière les faiblesses du capital humain camerou- nais. Il souligne notamment l’insuffisance des compé- tences dans les secteurs clés de l’économie. Les chiffres sont préoccupants. Entre 2020 et 2021, seuls 21 % des élèves étaient inscrits dans l’enseigne- ment secondaire technique. Au niveau universitaire, la situation est encore plus critique, seulement 1,5 % des étudiants sont inscrits en agriculture et 8,5 % en ingénierie, alors que 60 % privilégient les filières litté- raires et 32 % les sciences. Ce déséquilibre réduit considérablement le poten- tiel de transformation indus- trielle du pays.

Impact direct sur l’écono- mie et l’industrialisation

L’agriculture et l’ingénierie sont pourtant des secteurs stratégiques pour la crois- sance et l’autosuffisance économique du Cameroun. Cependant, le manque de formations spécialisées li- mite l’émergence de com- pétences techniques adaptées aux défis de l’in- dustrialisation. Le pays peine ainsi à développer une main-d’œuvre qualifiée, ce qui entrave sa compétiti- vité sur le marché interna- tional. L’indice du capital humain, qui était de 0,357 en 2020, reste inférieur à la moyenne des pays à re- venu intermédiaire. Cette faiblesse s’explique par des lacunes dans l’éducation et la santé, deux piliers essen- tiels pour le développement économique. La faible qua- lification des travailleurs freine la productivité et ré- duit l’impact des investisse- ments dans les infrastructures et l’innova- tion.

Urgence à promouvoir les sciences et les technolo- gies

Le rapport insiste sur la né- cessité d’une réforme pro- fonde du système éducatif afin de promouvoir les sciences, la technologie, l’ingénierie et les mathéma- tiques. Il préconise un ren- forcement de l’enseignement technique et professionnel, ainsi qu’une amélioration de l’ac- cès aux soins de santé et à la nutrition, facteurs déter- minants pour le développe- ment du capital humain.

Ginette Mondongou Ca- mara, économiste princi- pale du Pnud, souligne l’importance d’adapter l’éducation aux évolutions mondiales. « Nous sommes dans un monde dominé par l’intelligence artificielle, le numérique et le commerce en ligne. Si nous ne rele- vons pas rapidement le ni- veau de formation scientifique et technique, nous risquons d’être margi- nalisés », alerte-t-elle. Elle rappelle également que pour atteindre l’émergence, un pays doit garantir au moins huit années de sco- larisation ferme, alors que le Cameroun stagne à 6,5 %. Des réformes néces- saires pour un développe- ment durable. Face à ce constat, les autorités came- rounaises sont appelées à investir davantage dans l’éducation technique, la formation continue et l’amé- lioration des infrastructures éducatives. Il est impératif d’augmenter le nombre d’enseignants spécialisés et de moderniser les éta- blissements de formation professionnelle pour répon- dre aux exigences du mar- ché du travail. La question de l’accès à la santé est également cruciale. L’ab- sence de couverture médi- cale universelle pénalise la population et accentue la précarité. « Sans assu- rance maladie, les familles s’appauvrissent davantage en raison des dépenses de santé élevées. Il est urgent de garantir un minimum de protection sociale pour évi- ter de retomber dans la pauvreté », peut-on lire.

Ange Pouamoun

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