Pour que les 350 000 jeunes qui arrivent sur le marché du travail chaque année trouvent un emploi, les pouvoirs pu- blics doivent permettre à l’économie de passer d’une économie de pénurie de travail à une économie d’abondance de travail. Le problème de l’employabilité des jeunes est un sujet fon- damental. Même lorsqu’ils possèdent les compétences requises, il n’y a souvent pas d’emplois disponibles.
Ce problème est nuancé, car on constate que des jeunes diplômés de docto- rat sont au chômage et pré- fèrent s’humilier en demandant à être recrutés. Les économistes connais- sent bien le concept du <<piège de la pauvreté>>, selon lequel plus vous avez les moyens de subsistance, moins vous êtes incité à tra- vailler. Si quelqu’un a pu poursuivre des études uni- versitaires, cela signifie que ses parents ou quelqu’un d’autre a pu payer pour cela, ce qui implique qu’il a pu sortir de la grande pré- carité. Cependant, il reste souvent dans une situation de précarité, ce qui rend plus facile pour lui de rester au chômage que pour un jeune qui n’a pas d’autres ressources. C’est un pro- blème de survie, car lorsque vous n’avez pas le choix, vous êtes obligé de sortir et de vous débrouiller. Mais lorsque vous avez le choix, vous pouvez rester, surtout si vous avez connu la souffrance dans le passé et que vous voulez préser- ver vos enfants de cette souffrance. On est souvent prêt à faire des sacrifices supplémen- taires pour éviter de voir son enfant souffrir. C’est pourquoi nous constatons que ce sont souvent les jeunes que nous avons poussés le plus loin dans leurs études, et sur lesquels nous avons dépensé le plus d’argent, qui se retrouvent dans une situation de chô- mage. C’est un peu comme si nous avions fait un mau- vais investissement, car nous les avons mis sur un chemin sans issue. S’ils sont piégés dans la pau- vreté, il est très difficile, comme le disent les écono- mistes, de sortir de ce piège.
Recueillis par A.P