samedi 24 mai 2025

Le cacao, souvent consi- déré comme « l’or brun », est une culture essentielle

pour de nombreux pays afri- cains. En plus d’être une source de revenus vitale pour des millions d’Agriculteurs, il joue un rôle clé dans l’écono- mie mondiale du chocolat. Ce- pendant, la production de cacao en Afrique est de plus en plus menacée par les effets du réchauffement climatique. Les changements climatiques, tels que l’augmentation des tempé- ratures, la variabilité des préci- pitations, et l’intensification des événements climatiques ex- trêmes, exacerbent la vulnérabilité des systèmes de

production de cacao.

Analyser cette vulnérabilité est donc crucial du fait de ses im- plications profondes non seule- ment pour la productivité agricole, mais aussi pour la sé- curité alimentaire, les moyens de subsistance des Agricul- teurs, et la stabilité économique des régions productrices de cacao.

Notons que, les activités agri- coles elles□mêmes contribuent au changement climatique par des voies telles que les émis- sions de gaz à effet de serre, la déforestation, les changements d’utilisation des terres et les chaînes d’approvisionnement, créant ainsi des boucles de ré- troaction. De plus, lorsque cette température dépasse déjà la moyenne maximale quotidienne tolérable comprise entre 30°C et 32°C, elle implique pour les arbres, plus de stress hydrique, une perturbation du développe- ment des fleurs et par exten- sion des rendements plus faibles.

Quelques faits stylisés

Le rapport de « Climate Central

» intitulé « Climate change is heating up West Africa’s cocoa belt » du 12 février 2025 révèle que le changement climatique, dû principalement à la combus- tion du pétrole, du charbon et du gaz méthane, entraîne une augmentation des températures plus fréquentes dans les quatre pays d’Afrique de l’Ouest res- ponsables de la production d’environ 70 % du cacao mon- dial, l’ingrédient clé du choco- lat.

Il y est également mentionné que, l’analyse des tempéra- tures maximales quotidiennes au cours de la dernière décen- nie montre que le changement climatique a ajouté au moins trois semaines de températures supérieures à 32°C (89,6°F) par an pendant la principale saison de récolte du cacao (oc- tobre□mars) en Côte d’Ivoire et au Ghana. Ces températures sont supérieures à la plage de température optimale pour les cacaoyers.

Dans ledit rapport, au cours de la même période, le change- ment climatique a ajouté un peu plus de deux semaines de températures supérieures à 32°C par an pendant la princi- pale saison des cultures au Ca- meroun et plus d’une semaine au Nigéria. Enfin, en 2024, le changement climatique d’ori- gine humaine a ajouté six se- maines avec des températures supérieures à 32 °C dans 71 % des zones productrices de cacao en Côte d’Ivoire, au Ghana, au Cameroun et au Ni- géria.

Il en découle que non seulement, de nombreux facteurs, tels que les précipitations et les infections transmises par les in- sectes, peuvent affecter les ca- caoyers, une chaleur excessive peut contribuer à une réduction de la quantité et de la qualité de la récolte, augmentant po- tentiellement les prix mondiaux du chocolat et impactant les économies locales de la région. Ces faits peuvent se justifier par des fondements théoriques.

Adaptation et résilience

La théorie de l’adaptation met l’accent sur la capacité des communautés à s’adapter aux changements environnemen- taux grâce à des stratégies col- lectives. Des auteurs comme Adger (2003) soulignent l’im- portance du capital social et des réseaux communautaires dans le processus d’adaptation Elle suggère que les produc- teurs de cacao doivent modifier leurs pratiques agricoles pour s’adapter aux nouvelles condi- tions climatiques. Cela peut in- clure l’adoption de variétés de cacao plus résistantes à la cha- leur ou aux maladies, ainsi que des techniques de culture amé- liorées pour conserver l’humi- dité du sol.

La théorie de la résilience des systèmes agroécologiques pro- posée par des Chercheurs comme Holling (1973), cette théorie se concentre sur la ca- pacité des systèmes écolo- giques et sociaux à absorber les chocs tout en maintenant leur fonction. Dans le contexte du cacao, cela implique de dé- velopper des pratiques agri- coles durables qui permettent aux producteurs de faire face aux variations climatiques.

Cette approche met l’accent sur la capacité des systèmes agri- coles à se remettre des chocs climatiques. En diversifiant les cultures et en intégrant des pra- tiques agroécologiques, les producteurs peuvent renforcer la résilience de leurs exploita- tions face aux impacts du chan- gement climatique.

Par conséquent, il est essentiel d’intégrer des modèles écono- miques qui prennent en compte les effets du changement clima- tique pour élaborer des straté- gies d’adaptation efficaces.

Cela inclut l’évaluation des coûts associés à l’inaction face au changement climatique, ainsi que les bénéfices poten- tiels des investissements dans des pratiques agricoles dura- bles et des technologies rési- lientes.

Comment y faire face ?

Pour atténuer les chocs dus aux effets des péjorations plu- viométriques, les producteurs sont obligés de contrôler le ni- veau de risque en choisissant leurs investissements en fonc- tion des moyens de production disponibles. De plus, il convien- dra d’encourager les Agricul- teurs en diversifiant leurs cultures et en intégrant d’autres plantes qui peuvent coexister avec le cacao. Cela réduirait les risques liés aux fluctuations climatiques et améliorerait la sécurité alimentaire. Sans omettre la recherche sur les va- riétés de cacao plus résistantes aux maladies et aux change- ments climatiques, ainsi que sur des méthodes de culture innovantes.

Les Etats africains devraient promouvoir des techniques agricoles durables, comme l’agroforesterie, qui non seule- ment protègent les sols, mais améliorent également la biodi- versité et la résilience des cul- tures face aux conditions climatiques extrêmes. Il serait également intéressant d’investir dans des systèmes d’irrigation efficaces et des techniques de conservation d’eau pour aider les producteurs à faire face aux périodes de sécheresse.

En plus de cela, d’offrir des for- mations aux Agriculteurs sur les meilleures pratiques agri- coles et les nouvelles variétés de cacao résistantes aux mala- dies et aux conditions clima- tiques changeantes. L’on pourrait accorder des soutiens financiers en mettant en place des programmes de microcrédit ou des subventions pour aider les agriculteurs à investir dans des technologies et des pra- tiques qui améliorent la rési- lience.

In fine, l’adaptation et la rési- lience au réchauffement clima- tique pour la production de cacao en Afrique sont essen- tielles non seulement pour la durabilité de cette culture, mais aussi pour le bien□être écono- mique et social des communau- tés qui en dépendent. En adoptant des pratiques dura- bles et en renforçant les capa- cités locales, il est possible de minimiser les impacts négatifs du changement climatique et de garantir un avenir plus sta- ble pour la production de cacao.

Michelle Josée Ekila, Economiste en Histoire, Institutions et Développement

Exit mobile version